RDC : le CPJ exige la libération du journaliste Eliezer Ntambwe
Le 2 avril dernier, le journaliste, chroniqueur politique et présentateur de l’émission Tokomi Wapi sur la chaîne privée d'information, Eliezer Ntambwe, a été arrêté par la police judiciaire sans inculpation et détenu dans les locaux du parquet général de la capitale, Kinshasa. Le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) et l’Association congolaise pour l’accès à la justice (ACAJ) exigent des autorités de la République démocratique du Congo (RDC) la libération immédiate d’Eliezer Ntambwe.
Accusé de diffamation et d’extorsion de fonds en la personne du gouverneur de la province du Kasaï-oriental, Ngoyi Kasanji, Eliezer Ntambwe n’a fait l’objet d’aucune inculpation a précisé son conseil, Me Hervé Diakiese. Pour chacune de ces infractions, il encourt jusqu'à cinq années de prison. Ses avocats dénoncent une procédure « politique » et ainsi qu'une tentative d'intimidation de la presse.
A l'origine de la discorde, un diamant de 35 carats découvert dans la province du Sankuru en 2016 par un mineur, M. Lodi. Puis, en mars dernier, l’émission dans laquelle Eliezer Ntambwe donne la parole à des proches de M. Lodi qui accusent le gouverneur du Kasaï-Oriental de l'avoir frappé, enlevé et maltraité et « d’avoir extorqué un diamant de 45 carats de leur frère ». En contrepartie de la non diffusion de l'entretien, le journaliste aurait tenté de soutirer de l'argent au gouverneur, ce que celui-ci a refusé d'accepter. Le journaliste dément formellement les faits. Ses avocats parlent de « représailles politiques ». Le gouverneur affirme que cette procédure vise à rétablir son image dans l’opinion publique et que le journaliste aurait refusé de lui accorder un droit de réponse après diffusion de l’émission.
Mercredi 4 avril, une conférence de presse organisée par l’ACAJ a été tenue à Kinshasa afin d’exiger la libération sans condition de leur confrère indépendant et de dénoncer les conditions de son arrestation où ses droits fondamentaux n’ont pas été respectés. Me Georges Kapiamba, président de l’ACAJ, précise qu’il a été arrêté sur base d’un mandat d’amener et placé en détention sans avoir reçu préalablement de mandat de comparution et sans avoir été confronté au plaignant. « La justice a accordé des facilités indues au gouverneur Ngoy Kasanji en faisant confirmer sa plainte par voie de commission rogatoire au lieu de l’inviter à Kinshasa » précise-t-il.
La procédure a duré moins d’une semaine. Après trois jours de détention au Parquet, Eliezer Ntambwe, jeudi 5 avril tôt dans la journée et à l’insu des ses avocats, a été transféré à la prison centrale de Makala suite au refus de la justice d’accepter la demande de remise en liberté provisoire d'Eliezer Ntambwe. Ses conditions d’incarcérations sont exécrables et il côtoie des détenus criminels. Ses avocats vont faire appel à cette ordonnance de détention préventive.
L’ACAJ condamne l’attitude du gouverneur Ngoy Kasanji qui, après avoir saisi l’organe de régulation des médias (CSAC), devant lequel le journaliste devait comparaître en conseil disciplinaire le 4 avril 2018, est allé en justice pour les mêmes faits dans le but de restreindre la liberté de mouvement du journaliste et tenter de le réduire au silence. « Eliezer Tambwe est en réalité victime des représailles politiques en vue de sanctionner son journalisme d’investigation et sa liberté d’expression », déclare Me Georges Kapiamba. « Nous exigeons sa libération sans condition ainsi qu’une enquête urgente et crédible sur les allégations d’extorsion du diamant de 35 carats et surtout sur les circonstances du décès de M. Lodi », ajoute-t-il. L’ACAJ demande au Gouvernement de cesser toutes ses attaques contre les journalistes indépendants, et recommande de défendre efficacement la liberté de la presse et d’expression par tous les moyens juridiques.
L’opinion publique, quant à elle, estime que l’affaire présente quelques faits cachés surtout si l’on considère l’implication de Joseph Kabila, l’actuel président de la RDC, dans cette affaire étant donné qu’Eliezer Ntambwe revenait de Johannesburg en Afrique du Sud où il avait participé à la rencontre avec les Congolais de Moïse Katumbi, principal opposant politique de Joseph Kabila…
Béatrice Taupin
Dogan Presse Agence